Dans le cadre de sa stratégie dite de ‘‘dédiabolisation’’, le Rassemblement national tente, par tous les moyens, de se démarquer de passé fasciste et antisémite du Front national et de son fondateur Jean-Marie Le Pen. Tant et si bien que le RN affirme non seulement qu’il contribue à la lutte contre l’antisémitisme, mais se pose désormais en ultime ‘‘protecteur des Juifs’’, qualificatif que lui reconnaissent d’éminentes personnalités, parmi lesquelles l’illustre chasseur de nazis, Serge Klarsfeld.
Or, malgré tous les efforts déployés pour chasser le naturel antisémite de ses rangs, il revient aux galops ! En témoignent les nombreuses et infamantes déclarations tenues par des candidats RN qualifiés pour 2ème tour des élections législatives en cours.
Philosophe et historien des idées, directeur de recherche au CNRS, auteur d’une œuvre abondante*, Pierre-André Taguieff remonte le temps. Quand, comment et pourquoi s’est constitué le concept « Juif-capitalisme » ? Cette figure de l’ennemi principal des révolutionnaires – socialistes, anarchistes, communistes- est au cœur de la première forme de judéophobie moderne à gauche. De Charles Fourier à Karl Marx, l’amalgame entre les Juifs et les « spéculateurs », les « banquiers internationaux » ou la « finance internationale », reste l’acte fondateur de la haine antisémite dans le champ politique aux lendemains de la Révolution française.
Depuis l’affaire Dreyfus, les mouvements de gauche était perçus comme judéophiles, en dépit d’un antisémitisme historique datant du XIXe siècle qui a vu la gauche amalgamer judéophobie et anticapitalisme. Et depuis l’horreur nazie, l’antisémitisme était relégué à l’extrême droite. Sauf que les dérives décoloniales et indigénistes du wokisme sont en passe de donner naissance à un néo antisémitisme de gauche qui n’a rien à envier aux abjections de courants fascisant d’extrême droite.
Depuis le lancement, en mai 2019, du site Global Watch Analysis et du mensuel Écran de Veille – qui se définissent comme des médias progressistes, laïcs et humanistes, dédiés à la résistance aux fanatismes – nous avons placé la lutte contre l’antisémitisme au cœur de nos combats. En témoignent des dizaines d’enquêtes, interviews et éditoriaux publiés sous les plumes de Ian Hamel, Martine Gozlan, Jean-Marie Montali et Atmane Tazaghart.
La classe politique belge se caractérise peut-être davantage que toute autre en Europe par son déni de ce qui se passe actuellement au Proche-Orient. C’est particulièrement vrai depuis le pogrom du 7 octobre, qui semble émouvoir nettement moins que la riposte enclenchée depuis par Israël. Ainsi, ces dernières semaines, les propos affligeants et révoltants se succèdent. En voici un florilège :
S’il est vrai que la vieillesse est un naufrage, dans le cas du raïs palestinien Mahmoud Abbas (85 ans), cela s’apparente davantage à une longue et lamentable noyade qui entraîne dans son sillage la Palestine toute entière et sa juste cause. Usé physiquement, isolé et contesté politiquement, Abbas multiplie les gaffes et aberrations, depuis de longues années. Ultime dérapage, s’exprimant le 24 août dernier devant le ‘‘conseil révolutionnaire’’ de son parti, le Fatah, il a proféré de gravissimes propos antisémites : « Hitler n’a pas tué les juifs parce que juifs […] mais uniquement à cause de leur statut social d’usuriers » a-t-il asséné.
Le raïs palestinien reprenait ici une théorie fumeuse qu’il avait déjà développée lors d’une ‘‘leçon d’Histoire’’ prononcée devant le Conseil national palestinien, à Ramallah, le 30 avril 2018, selon laquelle « la raison de l’holocauste n’est pas l’antisémitisme des Nazis, mais le ‘‘comportement social’’ des Juifs » ! Mais dans ses élucubrations du 24 aout dernier, il a enrichi cette théorie infamante d’un argument nouveau teinté de complotisme : dans une délirante tentative de prouver que les « nazis n’étaient pas antisémites », il avançait l’étrange argument selon lequel « les juifs ashkénazes ne sont pas sémites », car « ils sont les descendants des Khazars [peuple turc ancien] qui n’ont rien à voir avec le sémitisme ». Ce qui, bien entendu, n’a aucun fondement historique !
Au début du mois de mars, Tariq Ramadan a exigé le renvoi d’un expert désigné par la justice afin d’analyser l’emprise qu’il pouvait exercer sur des jeunes femmes avec lesquelles il entretenait des relations sexuelles violentes. Pour demander le départ du docteur Daniel Zagury, la défense du prédicateur évoque « une manipulation ». En fait, le principal reproche fait à ce médecin est d’être… juif !
67 croix gammées, découvertes le 28 décembre dernier, profanant les tombes d’un cimetière municipal à Fontainebleau ; un torrent d’injures antisémites se déchaînant contre Miss Provence 2020, April Benayoum, pour avoir revendiqué son ascendance israélienne, le 19 décembre, lors de son élection comme première dauphine de Miss France 2021 ; des menaces de mort à caractère antisémite à l’encontre de la chroniqueuse TV, Valérie Benaim, le 29 décembre ; un livreur d’une grande enseigne de la nouvelle économie numérique, se ventant qu’il n’accepte pas de livrer aux juifs, le 7 janvier à Strasbourg ; et pour couronner le tout, un odieux courrier d’injures antisémites (et homophobes), adressé au porte-parle du gouvernement, Gabriel Attal, le 8 janvier… Le phénomène n’est pas nouveau, mais en l’espace de quelques semaines, c’est une véritable déferlante d’actes antisémites qui s’est abattue sur la France, souvent dans l’indifférence générale. Et plus inquiétant encore, au vieux mal antisémite, celui de la haine et de la bêtise (in)humaine, s’ajoute un nouvel antisémitisme, qui tente de se draper de justifications politiques, comme celui de l’icône des Indigènes de la République, Houria Bouteldja, justifiant les injures antisémites à l’encontre d’April Benayoum par un hallucinant argument selon lequel « on ne peut pas être israélien innocemment » !
Coup sur coup, Islamic Relief Worldwide, la principale ONG islamiste de Grande-Bretagne, a été contrainte de se débarrasser de deux de ses principaux dirigeants. Le premier pour des textes antisémites, le suivant pour avoir chanté la gloire du Hamas et des Frères musulmans.
Les bonnes feuilles du livre poignant de notre confrère Jean-Marie Montali « Nous sommes les voix des morts, les derniers déportés témoignent », qui vient de paraître au Cherche Midi. 75 ans après la libération des camps, ces témoignages de rescapés, qui résonnent comme des voix d’outre-tombe, décrivent l’indicible et nomment avec une sobriété toute singulière l’horreur absolue de la Shoah.