Dans son dernier livre ‘‘Islamophobie, mon œil !’’, Djemila Benhabib emprunte à Salman Rushdie une formule qui résume, à elle seule, toute l’ampleur de l’escroquerie mortifère, orchestrée par le tenants de l’islam politique, que la militante laïque et féministe d’origine algérienne entend dénoncer à travers cet ouvrage lucide et poignant, à mi-chemin entre l’essai politique et le témoignage autobiographique : « un nouveau mot avait été inventé pour permettre aux aveugles de rester aveugles : l’islamophobie », dixit l’auteur des ‘‘Versets sataniques’’ qui connaît mieux quiconque les supercheries intellectuelles de l’inquisition islamiste.
Djemila Benhabib trace une longue ‘‘ligne rouge sang’’ reliant la toute première ‘‘affaire du voile’’ (Creil, septembre 1989) à la décapitation de Samuel Paty (Conflans-Sainte-Honorine, octobre 2020). Cette « barabrie » qui découle d’une escroquerie intellectuelle mortifère : « l’acte de décapitation de Samuel Paty résume à lui seul la guerre ouverte contre l’école de la République déclenchée depuis 1989. Ce geste ignoble nous dit tout du modus operandi de l’islam politique. Dans l’antichambre de la violence, on retrouve le centre nerveux, l’idéologie, ce poison lent, inexorable. Cette matrice politico-idéologique sans laquelle la violence tomberait dans le vide. Les islamistes plus que n’importe qui connaissent la force des symboles et la puissance des concepts, d’où l’usage précis de la notion d’islamophobie pour camper le décor de leur crime. »
Pour l’auteure de ‘‘Ma vie à contre-Coran’’, l’accusation d’islamophobie est « l’antichambre de la mort ». Elle s’inscrit dans le cadre d’une « stratégie victimaire » que « les Frères musulmans appellent : changer la société en profondeur » dont l’objectif est de « grignoter du terrain, modifier nos lois […] anéantir les réflexes de la société, la priver du débat, la bloquer […] au nom du respect d’une prétendue ‘‘sensibilité’’. Avec la peur de blesser, le pas-de-vaguisme, l’obsession du consensus, la liberté en prend un coup. On s’efface. On ne dit plus rien. On se tait. Pendant ce temps-là, d’autres se réveillent la tête lourde, chargée de griefs, prêts à couper des têtes ».
Cette capitulation intellectuelle occidentale face à l’islamisme s’explique par le fait que nous nous sommes « laissé berner par les beaux mots qui enrobent les pires saloperies pour endormir les plus naïfs […] Pendant longtemps, nous avons refusé de nommer les choses, nous avons emprunté les mêmes raccourcis et suivi les mêmes chemins d’égarement […] Nous avons tout fait pour ignorer la nature totalitaire de l’islam politique […] Nous avons cédé trop souvent à la peur. Peur de nommer le mal, peur de blesser, peur de choquer, peur de stigmatiser, peur de déranger, peur d’être traité de raciste, peur de passer pour un islamophobe. »
Et de conclure que, du fait de cet « aveuglement », « notre boussole citoyenne » se retrouve « déréglée ». Car, « La force des djihadistes ne se trouve pas dans leur nombre, elle est à chercher ailleurs. À mi-chemin entre la lâcheté ambiante et le déni contagieux. C’est bien simple, jamais un tel ennemi de la démocratie n’a bénéficié dans l’histoire récente d’autant de complaisance de la part de ceux qui sont censés incarner et défendre la liberté » !