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« Listes communautaires » en France : la main du Qatar ?

17 décembre 2019 News   50824  

Comment est née la sulfureuse idée, portée par les relais hexagonaux des Frères musulmans, incitent les musulmans de France à présenter des « listes communautaires » aux prochaines municipales ? Trois semaines avant la grande marche communautaire du 10 novembre, le coup d’envoi de cette campagne visant à « frapper aux urnes » a eu lieu entre les murs du siège parisien du CAREP, le principal et plus influent Think-Tank qatari. Récit d’un lobbying savamment orchestré…

Par Atmane Tazaghart

Le Centre Arabe de Recherches et d’Etudes Politiques (CAREP) est le plus grand think tank qatari. Son fondateur est Azmi Bishara, ancien député arabe à la Knesset, qui a renoncé à sa nationalité israélienne, en 2007, pour devenir, trois années plus tard, l’un des plus influents conseillers de l’actuel émir du Qatar,Tamim Ben Hamad al-Thani.

Fer de lance de l’influence politique qatarie, le CAREP possède plusieurs filiales dans le monde arabe et en Occident.Outre sa maison-mère basée à Doha, ses deux déclinaisons principales sont une antenne maghrébine, installée à Tunis, et une filiale européenne basée à Paris.

Derrière son apparence académique, prétendument neutre, le CAREP sert de vitrine au lobbying politique du Qatar et des Frères musulmans. En témoignent les profils de ses principaux dirigeants. Son fondateur, Azmi Bishara, prône un renouveau du nationalisme arabe à travers une alliance stratégique avec l’« islam politique » cher aux Frères musulmans. Le directeur de l’antenne du CAREP à Tunis, Mehdi Mabrouk, a été ministre de la culture dans le premier gouvernement d’Ennahda, en décembre 2011. Son principal fait d’arme a été l’interdiction d’une exposition de peinture au palais d’El Abdelliya à la Marsa, en juin 2012, au prétexte que six des tableaux exposés « portent atteinte au sacré » ! Quant à la présidence de l’antenne parisienne du CAREP, elle est confiée à l’islamologue François Burgat, connu pour ses sympathies frères-musulmanes, dont le titre du dernier ouvrage résume de façon on ne peut plus équivoque le programme du CAREP : « comprendre l’islam politique » !

Une « hystérie française » !

Vendredi 18 octobre 2019, peu avant 19h, l’islamologue François Burgat s’installe à la tribune du siège parisien du CAREP, dont il est le président, pour animer une conférence intitulée « La France face à la radicalisation ». Il est interrogé par Salam Kawakibi, le directeur exécutif du CAREP-Paris.

Très vite, la conférence prend les allures d’une virulente charge anti française. Burgat dénonce la « posture française face à la radicalisation », considérant que « le raidissement anti musulman traverse l’Europe toute entière. Mais, dans ce glissement, la France est en tête ». Pis encore, il fustige « la France au sens restrictive », considérant que, sur le terrain de l’islamophobie, « la partition que le Rassemblement National nous joue au tambour, la droite nous la joue au saxo et la gauche à la flute ». Tant et si bien que « l’hystérie anti voile islamique est en train de devenir un trait marquant de la France, tout comme la baguette pain, la camembert et le vain rouge » !

Pour expliquer les raisons de cette « hystérie anti musulmane », qu’il qualifie de « spécificité négative française », l’auteur de « comprendre l’islam politique » évoque un mal qui, selon lui, remonterait à la révolution française et trouverait ses racines dans une « franchouillardise qui nous enferme dans une relation avec la croyance religieuse que nous considérons comme antinomique avec le processus de modernisation ». Raison pour laquelle « les féministes laïcardes, comme Élisabeth Badinter, ne peuvent pas concevoir qu’une femme voilée peut participer à un processus d’émancipation féminine ». Et d’ajouter que cette « incapacité d’admettre qu’il peut y avoir un féminisme islamique » illustre « l’état de décrépitude intellectuelle de France »

Frapper aux urnes :

Pour analyser le « mal français » qui a donné naissance à cette « dialectique de criminalisation de l’islam », Burgat s’est lancé dans une diatribe aux relents complotistes, évoquant « quatre registres » qui y contribuent : la « gauche intestinale » (Sic !) européenne ; les « natif informants » (référents originaires du monde arabe), constitués d’élites arabes de gauche, incapables, selon lui, de « donner une conception construite du monde arabe », car « ils sont minables dans les urnes » et « nous disent, dans la langue que nous comprenons, ce que nous avons envie d’entendre » ; les contre-révolutions orchestrées par les régimes despotiques arabes, qui « surfent sur la laïcité et l’islamophobie européennes » ; Ainsi que « l’appareil d’influence israélien » et les « médias d’obédience sioniste » qui veulent « nous convaincre que si le Hamas résiste (sic !), ce n’est pas parce qu’on l’écrabouille sous une occupation bestiale, mais parce que ce sont de vilains musulmans » !   

Et pour faire face à cette « hystérie anti musulmane » française, Burgat incite au vote communautaristes, affirmant que « tous ceux qui ne sont pas d’accord avec ce processus de criminalisation de la communauté musulmane doivent savoir qu’ils ont 6 millions de voix à portée de la main ». Il recommande, donc, aux musulmans de France qu’« il faut taper là où ça fait mal, il fait taper aux urnes, c’est l’endroit le plus fragile, et le rapport de force n’est pas si terrible que ça… »

La main du Qatar ?

Moins d’un mois après ce discours incitant au communautarisme, les relais des Frères musulmans en France ont lancé la sulfureuse idée de former des « listes communautaires » aux prochaines élections municipales. Et pour mobiliser leurs partisans, profitant de la nouvelle polémique sur le voile provoquée par un élu du Rassemblement National, ils lancèrent l’idée d’une grande marche communautariste à Paris. Une « marche de la honte », qui – comble de l’indécence – a été organisée le 10 novembre, à la veille du quatrième anniversaire des attentats du 13 novembre 2015.

On sait depuis les Qatar Papers, de Christian Chesnot et Georges Malbrunot, toute l’étendue de l’influence qatarie sur les organisations frères-musulmanes en France. Peut-on, pour autant, voir un lien de causalité entre la conférence incitatrice du Think-Tank qatari et la soudaine mise en branle des associations liées aux Frères-musulmans ?

On pourrait, en effet, croire que le discours de Burgat appelant au vote communautariste relève des élucubrations d’un vieil islamologue tombé, depuis longtemps, sous la fascination de son sujet de recherche : l’islam politique.

Sauf qu’un détail, lors de sa conférence au CAREP, a trahi le fait que cette incitation au communautarisme a été préméditée de concert avec le Think-Tank qatari. Car, dans son réquisitoire enflammé contre l’islamophobie française, le conférencier s’est laissé emporté. Il fallut donc que le directeur du CAREP, Sallam Kawakibi, intervienne pour lui indiquer que le temps prévu est presque écoulé. Burgat a, alors, voulu conclure sur le même thème du racisme anti musulman. Embarrassé, Kawakibi s’est vu obligé de lui dire publiquement : « non, avant de conclure, tu dois nous donner quelques préceptes et modes d’actions ». Burgat s’est alors rappelé qu’il lui fallait, comme convenu avec ses sponsors qataris, appeler les musulmans de France à frapper aux urnes !