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Présidentielle : Maître Zemmour sur un arbre perché !

17 novembre 2021 Expertises   25162  

atmane tazaghart
atmane tazaghart

Quoi de plus naturel qu’au terme du mandat d’un Président perçu – à tort ou à raison – comme le ‘‘Président des riches’’, le pouvoir d’achat soit la préoccupation première des Français ? Que la référence au peuple redevienne (comme elle n’aurait jamais dû cesser de l’être) la thématique centrale du débat politique ?
Fallait-il, pour autant, que la défense des ‘‘petites gens’’ débouche sur cette haine viscérale des élites ? Que le souci des plus faibles donne naissance à une dérive populiste dont l’objet n’est pas de voler au secours des ‘‘laissés pour compte’’, mais d’instrumentaliser la détresse du peuple et de nourrir son ressentiment, pour en faire une force destructrice portée par les pulsions les plus viles : racisme, suprématisme, repli sur soi et haine de l’autre…

Sans les renoncements et errements idéologiques qui ont conduit la gauche à se détourner de la ‘‘cause du peuple’’, la dérive populiste qui a donné naissance au phénomène Zemmour n’aurait, sans nul doute, jamais vu le jour…

Reste à savoir s’il s’agit d’une de ces ‘‘bulles automnales’’, fulgurantes et impressionnantes mais tellement éphémères, déjà observées par le passé avec Édouard Balladur, Jean-Pierre Chevènement, Benoît Hamon… ? Ou bien sommes-nous face à une véritable dynamique destinée à donner forme à la ‘‘vague dégagiste’’ que certains espèrent salutaire, quand d’autres redoutent ses méfaits dévastateurs ?

La réponse dépendra de l’orientation qu’Éric Zemmour donnera à sa candidature. Se révélera-t-il en Cassandre ou en illusionniste ? Pour l’heure, ses prophéties apocalyptiques (déclin, grand remplacement, islamisation, suicide français…) exercent sur l’opinion un effet de fascination/répulsion. Elles intriguent autant qu’elles effraient, mais seront-elle jamais crues ?

Et pour échapper à la cage de ce statut d’oiseau de mauvaise augure, Éric Zemmour sera, sans doute, tenté de faire illusion, en flattant les (res)sentiments des foules. Non pas par ses prédictions teintées de pessimisme et d’exagérations, mais grâce à des avis tranchés, excessifs et souvent essentielisants, sur les questions les plus brulantes qui animent notre société (les femmes n’incarnent pas le pouvoir ; l’islam et l’islamisme c’est kif-kif ; les réfugiés mineurs isolés sont tous des violeurs ; les pensionnaires des prisons françaises sont tous des Arabes ou des Noirs…).

Autrement dit, pour reprendre la métaphore de la célèbre fable de La Fontaine, Zemmour sera-t-il Maître Corbeau ou Maître Renard ?

S’il choisit de persévérer dans l’outrance des prophéties les plus pessimistes, il risquerait de laisser échapper le ‘‘fromage’’ de sa popularité de polémiste acquise, au cours des années, grâce à des émissions TV et des prises de positions clivantes et controversées. Car, de mémoire de politologue, même parmi les pires que la Terre ait enfantés (Hitler, Staline…), aucun leader n’a jamais réussi à galvaniser les foules en promettant le déclin ou en prophétisant le pire.

L’instrumentalisation des peurs capte les foules, c’est vrai. Cependant, pour les soulever, il y a toujours besoin de tracer un horizon pour laisser entrevoir des lendemains meilleurs. Quitte à ce que ceux-ci s’avèrent, après coup, illusoires ou trompeurs. Or, pour réussir ce tour de passe-passe, Éric Zemmour doit s’incarner en ‘‘Maître Renard’’ capable de donner aux pulsions les plus nauséabondes des foules l’apparence des ‘‘beaux plumages’’.

Dans les deux cas de figure, la morale à méditer reste immuable : ‘‘Apprenez que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute’’. Espérons qu’au soir du 24 avril prochain, ce sera Éric Zemmour seulement (et non pas toute la France) qui jur(er)a, mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus !